J'ignore comment les autres auteurs procèdent, mais pour moi, choisir le nom des personnages d'un nouveau roman est toujours un véritable casse-tête.
Quand on y pense, il s'agit de personnes fictives. Un auteur peut ouvrir le calendrier au hasard et leur donner le nom du premier saint sur lequel il tombe. Pourtant, je n'arrive pas à m'y résoudre. Je passe souvent des jours entiers à parcourir des sites tels que "Bébé bientôt ? Le meilleur moteur de recherche pour prénoms" ou "Les vrais noms des rappeurs" (ils sont souvent encore plus croustillants que les faux), je scrute les génériques de films et de séries télévisées pour regarder le nom des membres de l'équipe technique à la recherche de l'inspiration...
Parfois, je me demande si je ne passe pas plus de temps à choisir les noms de mes personnages qu'à construire l'intrigue.
Généralement, les prénoms que j'utilisent sont des références à des personnages d'autres romans, de films, de série ou à des personnes réelles. Il arrive aussi qu'il y ait un lien entre l'étymologie du nom ou prénom que j'utilise et la fonction du personnage dans le roman.
Il arrive qu'un nom s'impose de lui-même. "Alice Crane" a été une évidence avant même que je ne commence à réfléchir à l'intrigue. Ce nom me semblait si familier que j'ai d'abord pensé qu'il s'agissait de l'héroïne d'un film ou d'un livre que j'avais oublié. Il s'avère que non.
Décortiquer ce nom est assez simple : Alice entre dans un monde étrange et effrayant dont elle pourrait ne jamais sortir et le nom de famille Crane vient de Sleepy Hollow, dans lequel Ichabod Crane se sert d'une médecine légale balbutiante pour résoudre les crimes du Cavalier sans tête.
Le prénom de "Jeffrey McLaughan" dans Dream Box vient de La vie trop brève d'Edwin Mullhouse, écrivain américain, 1943-1954, par Jeffrey Cartwright de Steven Millhauser. J'ai lu ce livre il y a de très nombreuses années, mais il m'avait alors beaucoup marquée. Pour ceux qui ne le connaîtraient pas, il s'agit de l'histoire d'un "prodige" mort de façon prématurée racontée par son "biographe" de onze ans, Jeffrey Cartwright. Le prodige n'étant pas forcément celui que l'on croit... Ce livre est à la fois très intelligent et très drôle, contrairement à ce que le thème pourrait laisser penser.
Nommer des personnages est compliqué, mais aussi intéressant... et on risque moins gros qu'en nommant de véritables enfants (je n'ai personnellement jamais eu de réclamation). Il est aussi toujours possible de changer d'avis. Le nom de Keryam (Edencity - Alice Crane) a dû se "fixer" tout seul. Je ne trouvais rien, alors je l'ai appelé comme ça me venait. J'écris très vite et il m'arrive d'oublier le nom d'un personnage en cours de route quand il n'apparaît pas régulièrement. Ici, je n'ai jamais vérifié son nom. Il a été appelé Lilliam, Kirian... suivant les passages. Une fois le livre terminé, j'ai fait un petit recensement et j'ai pris le nom qui revenait le plus souvent. C'était Keryam.
Une erreur que je commettais souvent dans mes premiers manuscrits était de donner des noms trop similaires aux personnages, ce qui va conduire le lecteur à les mélanger. C'est d'autant plus important dans un roman comprenant beaucoup de points de vue différents. Dans la première version de Sous l'eau qui dort, Grace s'appelait Cora. En présentant ce texte à des éditeurs, je me suis aperçue que tout le monde confondait donc Cora avec Claudia, à cause de la similarité graphique des deux noms.
L'année dernière, j'ai écrit deux romans se passant au Japon. Le premier , Le miroir aux sortilèges, paraît d'ailleurs le mois prochain (comme le temps passe vite...). Le second mérite encore d'être travaillé et n'a pas encore quitté ma clé USB. Mais avoir un roman se passant dans un pays qui utilise des caractères chinois pour former les noms ajoute une dimension encore plus intéressante au choix des noms des personnages puisque chaque caractère formant ces noms signifie quelque chose. Le nom peut donc être une sérieuse indication sur les caractéristiques du personnage ou sur ce qui va lui arriver au cours du roman.
L'héroïne du Miroir aux sortilèges s'appelle Misaki. Dans mon cas, son prénom s'écrit 美咲, le premier caractère (Mi) signifie belle, beauté, tandis que le second (Saki) indique la floraison. Or, ce personnage est la présidente du club d'Ikebana (art de l'arrangement floral) de son collège. Son prénom est donc une indication sur son hobby.
Il est vrai que ce type de référence ne sera pas comprise par beaucoup de personnes, puisqu'il faut connaître les caractères chinois pour les comprendre, mais je trouve tout de même ça intéressant. Il suffit qu'un ou deux lecteurs remarque l'effort qu'on a fait pour choisir les noms de ses personnages pour que ça en vaille la peine, non ?
Réflexions sur le fantastique, la vie d'auteur, le Japon et Bram Stoker sait quoi encore...
samedi 31 mai 2014
mercredi 28 mai 2014
Dream Box
Dream Box paraît aujourd'hui (même s'il était déjà en vente sur Amazon depuis une semaine... les bizarreries de la vente en ligne). Bref, le voilà :
Oui, je trouve que la couverture donne une fausse image du livre. Vraiment figée et sombre. Je pense que les lapins devraient être ajoutés, histoire de l'égailler un peu.
Il est question de fantastique, de meurtre et d'ombres... mais aussi d'amour et d'espoir ! (bon, il n'y a pas de lapins dans l'histoire, je l'avoue)
Peut-être que je devrais aussi emmener les lapins dans les salons du livre ? Ils attireraient sûrement les foules.
Bref, Dream Box est l'un des livres sur lesquels j'ai le plus travaillé. Il s'agit de suivre un personnage (Jeffrey) depuis son enfance jusqu'à l'âge adulte entre la fin des années 70 et le début les années 90 aux Etats-unis.
Le livre est découpé en trois parties, chacune du point de vue d'un personnage différent : Jeffrey, un garçon solitaire persécuté par d'étranges ombres ; Theresa, qui doit épouser l'homme que sa famille a choisi mais qui se révélera être le grand amour de la vie de Jeffrey et peut-être celle qui le sauvera de ses démons ; puis Andy, un adolescent aux pouvoirs étranges.
On m'a récemment posé des questions sur la façon dont je concevais mes romans. Celui-ci a été écrit d'une façon un peu particulière. En réalité, chaque partie illustre d'une façon assez détournée une chanson des Smashing Pumpkins.
J'ignore pourquoi. A l'époque où j'ai conçu le roman et commencé à l'écrire, j'écoutais pas mal Mellon Collie and the Infinite Sadness. Un jour, en écoutant cet album, je me suis aperçue que chacune de mes parties collait à une de ses chansons de façon évidente. Je m'en étais inspirée de façon inconsciente.
C'était la première fois que ça m'arrivait. Habituellement, je m'inspire plus d'éléments visuels.
Si certains sont curieux, ce sont toutes d'excellentes chansons, qui méritent de toute façon d'être (ré)écoutées
La première partie, Jeffrey, va avec Disarm : "The killer in me is the killer in you, my love"
La deuxième partie, Theresa, correspond à Tonight, tonight : "Time is never time at all, you can never ever leave without leaving a piece of youth"
La troisième, AJ, correspond à Bullet with butterfly wings : "Despite all my rage, I am still just a rat in a cage"
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